En corps
Analyse du film : En corps de Cédric Klapisch
Dans En corps, Cédric Klapisch suit une danseuse blessée qui doit réapprendre à vivre et à danser. Elle doit surtout accepter de se réapproprier un corps habitué à travailler la danse d’une certaine manière et faire entrer la douleur, la perte dans sa vie, quitte à réintroduire des figures délaissées et faire une rencontre déterminante avec elle-même. Une œuvre intense, soignée et généreuse. Elise, 26 ans est une danseuse classique expérimentée. Elle se blesse pendant un spectacle et apprend qu’elle ne pourra plus danser. Dès lors sa vie va être bouleversée, Elise va devoir apprendre à se réparer… Entre Paris et la Bretagne, au gré des rencontres et des expériences, des déceptions et des espoirs, Elise va se rapprocher d’une compagnie de danse contemporaine. Cette nouvelle façon de danser va lui permettre de retrouver un nouvel élan et aussi une nouvelle façon de vivre. La séquence d’ouverture d’En corps est magnifique et époustouflante. Plongé, pendant plus de dix minutes quasi sans parole, dans les coulisses, dans la salle et sur la scène d’un ballet de danse classique, le spectateur est émerveillé. Cédric Klapisch offre un parcours sensoriel dans les pas d’Elise. Il donne à voir, à sentir le corps de la danseuse en mouvement et tout ce qui s’agite autour d’elle. L’enjeu pour Elise est autant de réapprendre à vivre qu’à danser. Elle doit apprendre à s’ancrer dans le sol, dans la réalité et ressentir d’autres sensations, de créer de nouvelles images. Elise va redessiner sa destinée. Quand elle rejoint une résidence d’artistes avec un couple d’amis, Elise rencontre une troupe de danseurs menée par l’Israélien Hofesh Shechter (lui-même dans le film. Elise se libère et se réinvente, elle réapprend à vivre, bouger, respirer et aimer. Alors qu’elle se plaignait de ne jouer dans les ballets classiques et que des femmes allant vers la mort, elle va faire le chemin inverse : celui vers la vie. L’histoire de cette renaissance est un bel hymne à la volonté, au courage, à l’optimisme, à la foi en un avenir meilleur. Cédric Klapisch filme l’énergie, le mouvement, la musicalité, la force et la fragilité des corps dansants. Ce réalisateur est un amoureux de la danse. Il a choisi parmi les 60 danseuses de l’Opéra de Paris, l’une des Premières danseuses, Marion Barbeau. Ce n’est pas la première fois que Cédric Klapisch filme la danse : il avait déjà consacré un documentaire à la danseuse étoile Aurélie Dupont en 2010 et signé en avril 2020 un court-métrage, Dire merci, réalisé avec les danseuses et danseurs du Ballet de l’Opéra National de Paris pendant le confinement. En corps est sa première tentative de transmettre sa passion de la danse à travers une fiction, en mêlant acteurs et danseurs professionnels.
Philippe Cabrol