Le Garçu
A voir à la télé cette semaine : LE GARÇU DE MAURICE PIALAT
Diffusé ce Mercredi 30 mars sur Arte à 20h50
En 1995, Maurice Pialat retrouve Gérard Depardieu pour la quatrième et dernière fois, pour Le Garçu. Il lui demande d’être son double cinématographique. Ce film peut être considéré comme le film- testament de Maurice Pialat. . Tout y est : le couple qui se déchire interminablement (Nous ne vieillirons pas ensemble), l’enfance (L’Enfance nue), la mort d’un des parents (La Gueule ouverte), les rapports père-enfant (À nos amours) et, comme toujours, le quotidien (Loulou, Police) et la vie…Gérard et Sophie sont un couple de la classe moyenne supérieure, qui a un petit garçon de quatre ans, rieur et turbulent, Antoine. Lors de vacances passées à l’île Maurice, le couple se dispute et décide de se séparer à l’amiable, sans divorcer. Sophie restera dans l’appartement parisien avec Antoine et Gérard ira vivre ailleurs, mais pas trop loin. Gérard aime passionnément son fils de cinq ans et cherche à le revoir par tous les moyens. Gérard voit donc grandir Antoine, son petit garçon. Il a le sentiment de n’avoir jamais aimé autant et de n’avoir jamais été autant aimé. Expliquons le titre : le garçu veut dire garçon en patois auvergnat. Tout laisserait penser que ce terme désigne Antoine, mais ce n’est pas le cas. Le garçu est le père de Gérard, le grand-père d’Antoine donc, qu’on a surnommé ainsi dans l’Auvergne où il a vécu. Dans ce film, Pialat fait jouer son propre fils, Antoine. C’est Depardieu qui joue le père, en y mettant toute la joie douloureuse qu’il devine dans cette paternité tardive, ainsi qu’un peu de ses propres souvenirs de père. On trouve aussi un père qui meurt, mais c’est l’aïeul – il s’appelle « le Garçu », c’est ainsi qu’on appelait le père de Maurice Pialat dans son village natal de Cunlhat (Puy-de-Dôme). Le Garçu marque le retour de Pialat à la veine autobiographique dans la lignée de Nous ne vieillirons pas ensemble et surtout de La Gueule ouverte. Pialat filme le cercle familial Dans ce film, les personnages vivent dans l’aisance, l’argent est facilement dépensé, mais les relations humaines sont toujours aussi conflictuelles et douloureuses. À la quête du plaisir, à la difficulté de vivre ensemble s’ajoute l’hystérie paternelle. L’histoire passe par des crises conjugales, des tristesses et des rancœurs, comme dans tous les films de Pialat. Ici il filme les premiers mots d’un enfant ainsi que la mort d’un vieil homme. Au premier qui dort et au second qui rend l’âme, le personnage de Depardieu à un moment prend la main, pour la regarder, pour s’extasier de la glorieuse évidence d’une main humaine et de la vie qui se lit à travers elle. Le garçu qui n’est pas le meilleur film de Pialat, est d’une extrême rigueur formelle avec des plans soigneusement pensés et préparés. Il peut dérouter par son organisation en une dizaine de blocs de séquences que l’on a du mal à situer les unes par rapport aux autres. Film dépourvu de progression dramatique, il est cependant une œuvre grave et juste aux accents déchirants. Philippe Cabrol