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Ma famille afghane

Analyse du film : Ma famille afghane.

Réalisatrice : Michaela Pavlátová ; Genre : film d’animation, drame

Distribution : Hassan Madjooni, Pantea Panahiha, Rayan Sarlak

Durée : 1h20 ; Sortie : 27 avril 2022

Présenté en compétition au 60e Festival d’Annecy 2021, Ma Famille afghane, où il fut récompensé par le prix du jury est le premier long métrage d’animation de la réalisatrice tchèque Michaela Pavlatova, Il s’agit de l’adaptation du roman Freshta de Petra Procházkova, qui raconte à la première personne le quotidien d’Herra, une jeune femme d’origine tchèque qui, par amour, quitte tout pour s’installer en Afghanistan avec Nazir, son futur mari. Helena, d’origine thèque et étudiante à Prague ne s’épanouit pas et aspire à une autre vie que celle de son quotidien universitaire. Elle rencontre à l’université Nazir, qu’elle va vite considérer comme l’homme de sa vie. Helena par amour, décide de tout quitter pour suivre à Kaboul Nazir son futur mari et devient Herra. Les mises en garde de sa famille, de ses amis à propos de son avenir en tant que femme en Afghanistan ne l’inquiètent pas. Herra va devenir témoin et actrice des bouleversements que sa nouvelle famille afghane vit au quotidien. Son rêve est d’avoir beaucoup d’enfants avec Nazir, or ce rêve ne se concrétise pas. Un jour, la tante de Nazir leur confie Maad, un jeune orphelin qui est rejeté par les autres. La vie avec Maad va aider Herra à trouver sa place dans sa nouvelle famille afghane. Loin d’être un portrait manichéen du pays, le film raconte de l’intérieur, avec humour et tendresse, les petites choses de la vie comme les grands bouleversements qui frappent les personnages. On découvre ainsi la vie au sein d’une famille afghane traditionnelle ainsi que la manière dont l’héroïne parvient à trouver sa place dans ce monde si éloigné du sien. Avec un mélange d’humour et de tendresse, Herra nous fait découvrir son existence, la place de la femme dans la société afghane et dans sa nouvelle famille. Comme dans toutes les familles, il y a des dissensions et des complicités, des moments joyeux et des disputes. Herra partage le quotidien de huit autres personnes : le grand père bienveillant, la belle-mère, revêche par principe mais finalement pas si hostile, la belle-sœur Freshta, rapidement complice, qui a épousé un vendeur de poulets frustre et violent, et leur quatre enfants, avides de bêtises et de liberté. Ainsi qu’un jeune enfant un peu étrange, au crane trop grand et aux muscles atrophiés, à la lisière de l’intégration et du rejet social car échappant par nature à la norme : Muhammad, dit Maad, bien plus adulte dans sa tête que dans son corps. Le personnage de Muhammad va amener dans le chaos la sagesse de ceux qui connaissent la solitude et la souffrance. La position conjugale originale de la jeune Européenne lui permet aussi de porter sur les traditions afghanes un regard beaucoup plus souple que les humanitaires occidentaux pour lesquels elle va bientôt travailler. Mais malgré la difficulté du quotidien, des signes inquiétants assombrissent le tableau : des accès réguliers de machisme de Nazir pour conserver la face au regard de sa famille (cependant perpétuellement rattrapé par son amour sincère pour sa femme), la volonté du beau-frère de marier sa fille à peine pubère, les talibans qui commencent à menacer sérieusement l’équilibre instable de la société, le regard biaisé et négatif des Afghans sur cette femme occidentale Ma famille afghane  montre des situations et des personnages contrastés, multiples, jamais univoques. On est touché par le refus de la réalisatrice de porter un regard définitif ou explicatif sur l’Afghanistan. Ici, l’intrigue reste au plus près du point de vue des personnages, en effet aucun jugement n’est porté sur les personnages qui nous sont montrés. Ce film, bel hommage à la tolérance envers les cultures différentes, à la complexité des sentiments, présentant des personnages attachants et une société de l’intérieur que l’on n’a pas l’occasion de voir de la sorte possède une grande tendresse et propose une plongée intéressante d’une femme occidentale vivant dans un milieu où les femmes ne sont pas libres de tous leurs choix. À travers ses yeux, on va découvrir de l’intérieur un monde dans lequel les femmes ont aussi leurs grands moments de joie et de bonheur et partagent entre elles un certain nombre de choses. Ma famille Afghane est un excellent film animé Avec une histoire très bien documentée, une réalisation laissant une belle part aux personnages et à l’émotion et des protagonistes généralement très attachants, l’œuvre est captivante à découvrir.

Philippe Cabrol

https://chretiensetcultures.fr