La Maman et la putain
En direct du Festival de Cannes : La Maman et la putain de Jean Eustache
Film culte du cinéma d’auteur des années 70 et considéré comme un chef-d’œuvre, il fait l’ouverture de la sélection Cannes Classics 2022. Tout le film est construit sur des conversations, des dialogues ou des monologues, cadrés en longs plans-séquences et en champ contre-champ. Jean Eustache réalise son film en 16 mm et en noir et blanc, avec des choix dignes des films de Robert Bresson. Le réalisateur, modèle son héros en son alter ego , angoissé élégant et dragueur assez pathétique. Alexandre, une sorte d’intellectuel désœuvré, désargenté et vivant chez Marie, sa maîtresse, se lève un matin et va retrouver son ancienne petite amie, Gilberte, lui offrant de l’épouser. Elle ne prend pas sa proposition au sérieux et le repousse. Plus tard, Alexandre croise le regard d’une fille sur la terrasse d’un café et lui demande son numéro. Il s’agit de Veronika, une infirmière.
Présenté au Festival de Cannes 1973, La Maman et la putain y obtint le Grand Prix du Jury même si sa présidente, Ingrid Bergman, avait été choquée par les propos crus des dialogues. La sexualité, dont l’avortement qui était encore interdit à la sortie du film, y est abordée en toute liberté. Ce film très long se justifie par l’évolution psychologique des personnages principaux, notamment Alexandre. La sexualité, dont l’avortement qui était encore interdit à la sortie du film, y est abordée en toute liberté. Cependant Les idéaux de la libération sexuelle de mai 68 semblent ici céder le pas à un désenchantement.
La Maman et la putain fait de nombreuses références à des réalisateurs : Murnau, Ray,… On pense aussi à Rohmer, Godard, Pialat avec les récits des états d’âme des protagonistes. « C’est le seul de mes films que je haïsse car il me renvoie trop à moi-même, à un moi-même trop actuel. Le passé de mes autres films me protège», écrit Eustache dans un texte qui figure dans la réédition du scénario de la Maman et la Putain. Ce film dérange, notamment par sa manière de discourir sur la sexualité . Il est toutefois une expérience troublante qui a marqué un certain nombre de cinéastes contemporains : Jim Jarmusch, Jane Campion, Gaspar Noé,…
Philippe Cabrol