Login

Lost your password?
Don't have an account? Sign Up

A Bigger splash

Film à voir cette semaine à la télévision : A Bigger splash

Mercredi 29 juin, Arte à 20h55

Lorsque la légende du rock Marianne Lane, star exténuée et aphone, décide d’abandonner sa tournée pour se ressourcer avec Paul son compagnon et part sur l’île méditerranéenne de Pantelleria avec Paul, , c’est pour se reposer. L’arrivée non souhaitée de Harry, ami gueulard et outrancier, ex-manager et amant de Marianne, accompagné de sa fille Pénélope, aussi sexy qu’énigmatique, va alors bouleverser cet équilibre. Leur cohabitation saisonnière va révéler la nature réelle de leur relation. Et le passé ressurgit…

En voyant A Bigger Splash, on pense évidemment à La Piscine, le chef-d’œuvre de Jacques Deray tourné en 1969. Le long-métrage du cinéaste italien Luca Guadagnino en est tout simplement un remake librement actualisé. Mais la grande question qui se pose tout au long de la découverte de ce drame passionnel aux allures de thriller psychologique sulfureux, sera de savoir quel était l’intérêt fondamental de revisiter un tel classique emblématique du cinéma français, qui n’a d’ailleurs pas pris la moindre ride, 47 ans après sa sortie. Luca Guadagnino souhaitait à la fois conserver et se défaire des thématiques développées par Deray, profitant de la modernité de l’histoire pour réaliser un portrait contemporain de notre époque. Mais surtout, c’est sur la question du désir que va travailler le metteur en scène. Comment celui-ci peut avoir ce pouvoir de « se transformer en force destructrice ou productrice et féconde », dira- t-il. Guadagnino prend de belles distances avec l’œuvre originale et s’en offre une véritable réinterprétation. Il ne garde du scénario de base que l’armature et nous voici propulsés dans un huis clos psychologique aux abondants sujets et à l’originalité certaine.

Avec un style radicalement différent de celui de Deray, Guadagnino laisse « tomber » la délicatesse, et la finesse de La Piscine, pour nous offrir dans une œuvre volontairement plus excentrique. Nous sommes face à quelque chose d’envoûtant, de fascinant, tout en mélangeant érotisation, mystère et violence passionnelle. Guadagnino s’attache en premier lieu à disséquer le désir qui lie ses personnages. Le désir est en effet au centre de toutes les relations entre ces quatre personnages. Le désir devient incontrôlé et incontrôlable, il est le théâtre d’affrontements psychologiques violents entre ces quatre adultes.

Ce film est aussi un « grand saut » dans l’univers musical des Rolling Stones. La musique c’est le lien passé. Le passé va se confronter au présent. Mais les chuchotements de Marianne s’opposent à l’ivresse d’Harry. A Bigger splash est aussi une « plongée » dans l’Italie natale du réalisateur et plus particulièrement sur de l’île de Pantelleria où se déroule l’action. Luca Guadagnino filme avec éloquence son ciel bleu et ses paysages dont la nature aride et rocheuse nous fait penser au Stromboli de Roberto Rossellini. Comme l’ascension d’Ingrid Bergman sur le volcan maléfique, l’arrivée au sommet d’un sentier rocheux de l’excursion de Paul et Pénélope fait basculer le destin des personnages. Cette Italie est aussi le regard que le réalisateur pose sur le peuple insulaire, il en montre la convivialité mais aussi la xénophobie. Il va jusqu’à intégrer à son film un drame géopolitique contemporain qui reste à l’état de toile de fond. L’Île où se déroule son histoire est un rivage sur lequel accostent les bateaux clandestins des migrants. On les aperçoit tantôt cachés dans la montagne, tantôt emprisonnés ou désignés comme les coupables idéaux de tous les crimes. A Bigger splash serait –il cette « grande plongée » des migrants qui comme les héros de l’histoire cherchent un nouveau départ et la possibilité d’une vie meilleure ?

Irritant pour les uns, hypnotique pour les autres, une chose est sûre, A Bigger Splash ne laissera pas insensible

Philippe Cabrol

https://chretiensetcultures.fr