
In Viaggio
Analyse du film actuellement au cinéma : IN VIAGGIO de GIANFRANCO ROSI
Infatigable voyageur et grand faiseur d’images, qui aurait imaginé que Rosi déciderait un jour de s’enfermer dans une salle de montage pour concocter un film à base d’images d’archives. En l’occurrence, celles du Vatican, qui documente les déplacements du pape François.
Dans son documentaire Fuocoammare (2016), Gianfranco Rosi filmait d’un côté les migrants qui débarquent à Lampedusa, de l’autre les locaux de l’île qui vivent dans une quasi-¬indifférence envers les premiers. Dans In viaggio, qui suit les voyages du pape, le cinéaste adopte une construction proche de ce précédent film, celle du montage parallèle. On assiste d’un côté aux déclarations du pape pour l’accueil et la solidarité avec les migrants ou contre la guerre, de l’autre à des scènes de violences et de misère.
En 2013, pour son premier voyage, le pape François se rend sur l’île de Lampedusa, où il fait appel à la solidarité avec les migrants. Depuis le début de son pontificat, il a déjà visité 53 pays, s’exprimant tour à tour sur la pauvreté, la dignité, le climat, les migrations et la condamnation de toutes les guerres. À travers un montage d’archives, Gianfranco Rosi retrace l’itinéraire du pape, témoin de la misère du monde et toujours plus conscient des limites du réconfort de ses paroles.
Le documentaire s’ouvre et se conclut sur un très gros plan du pape les yeux baissés. Puis nous voyons le pape François à Lampedusa qui dénonce « la globalisation de l’indifférence », comme aux États-Unis le commerce des armes et les abus sexuels commis par certains prêtres, au Canada l’oppression des peuples indigènes par de nombreux chrétiens, en Arménie le génocide, ou en Irak l’instrumentalisation guerrière de la religion. On voit aussi le Pape François visiter des prisons de femmes et d’hommes, on le voit parler du pouvoir de collaborer avec d’autres religions, on le voit lors de conférences de presse, on le voit dire que la dignité est contagieuse, on le voit se rapprocher de ceux qui souffrent de pauvreté et de ceux dont les droits sont niés, on le voit dénoncer l’absence de reconnaissance des immigrés comme réfugiés,…
En une vingtaine de séquences et autant de voyages, Rosi rend compte de l’exercice de la conscience d’un homme doux, troublé par le monde moderne mais plein d’ espérance pour l’humanité
In Viaggio fut longuement ovationné lors de sa projection hors compétition à la 79e Mostra de Venise.
Philippe Cabrol