
Retour sur la conférence : Histoire du dialogue judéo-chrétien au XXe siècle
Ce mardi 2 avril 2024 à la salle Pétrarque de Montpellier, l’historien universitaire montpelliérain P.-Y. Kirschleger nous a donné une conférence sur le dialogue judéo-chrétien au XXème siècle, qui fut très apprécié des 105 personnes présentes.
Chrétiens et Cultures remercie M. Iancu – directeur de l’Institut Universitaire Maïmonide Averroes Thomas d’Aquin – d’avoir accepté d’inclure cette conférence dans sa programmation 2023-24.
Le conférencier a exposé les différentes étapes de ce dialogue et cité leurs acteurs : partant chez les catholiques du philosémitisme développé notamment à Lyon dans les années 1920-30 par l’abbé Jules Montchanin et Henri de Lubac, en passant par Oscar de Férenzy qui fonde La juste parole (journal en opposition à La libre parole, portant les thèses antisémites de Drumont), aboutissant à l’encyclique de Pie XI Mit brennender Sorge (1937).
Dans le contexte de la la 2nde guerre mondiale, l’idéologie et les mesures anti-juives provoquent des réactions chrétiennes :
en Allemagne et aux Pays-Bas, les églises protestantes adoptent « une posture confessante » en protestant publiquement ; en France, le Pasteur Boegner et le cardinal Gerlier adoptent une stratégie d’influence qui montre ses limites, car elle se révèle inopérante. Par la suite, les archevêques de Toulouse (Mgr Saliège) et de Marseille ainsi que les évêques d’Albi et de Bayonne développent une protestation publique, de même que les protestants en 1942. Puis vient le temps de l’action silencieuse et de la solidarité secrète.
L’après-guerre est marqué en 1947 par la déclaration de Seelisberg (Suisse), qui donne des repères aux Églises pour les aider à mettre fin à l’animosité vis-à-vis des Juifs et les encourager à « l’amour fraternel à l’égard du peuple de l’Ancienne Alliance » et en 1948 par la parution du livre de Jules Isaac, Jésus et Israël, dans lequel il démonte les racines de l’antisémitisme en s’appuyant sur les textes bibliques. Sa formule « mettre fin à l’enseignement du mépris » marquera les esprits. Il s’agit de repenser les relations entre les Juifs et les chrétiens. En octobre 1965 paraît la déclaration conciliaire Nostra Aetate sur les relations de l’Église catholique avec les religions non chrétiennes. En 1986, Jean-Paul II se rend à la synagogue de Rome. Le cardinal Jean-Marie Lustiger joue un rôle important dans la transformation des relations judéo-catholiques. Dans les années 80, l’affaire du carmel d’Auschwitz empoisonne pour une dizaine d’années ces relations.
L’année 1993 marque la reconnaissance de l’Etat d’Israël par le Saint-Siège. En 2000, Jean-Paul II se rend en Israël et va prier à Jérusalem au Mur des Lamentations. En septembre 2000, 170 intellectuels juifs américains font une déclaration Dabru Emet (Dire la vérité) sur les relations entre judaïsme et christianisme. En 2001, les Églises protestantes européennes publient une déclaration Église et Israël. En 2015, les 50 ans de Nostra Aetate sont célébrés.
Il reste du travail à accomplir. Le message des Églises – l’enseignement de l’estime – n’est pas totalement assimilé. Les clichés anciens sur le « peuple déicide » ont la vie dure. De plus, le repli communautaire constitue aujourd’hui une tentation. Les questions et remarques de l’assistance ont porté notamment sur la position des Églises orthodoxes, et la parution en 2023 de l‘ouvrage de la Conférence des évêques de France Déconstruire l’antijudaïsme chrétien.
Et voici le retour vidéo :