Login

Lost your password?
Don't have an account? Sign Up

Close

Analyse du film : Close de Lukas Dhont

sortie en salle le 2 novembre

Le second long métrage de Lukas Dhont est une œuvre forte sur le deuil et l’affirmation de soi.

Léo et Rémi, 13 ans, sont amis depuis toujours. Jusqu’à ce qu’un événement impensable les sépare. Léo se rapproche alors de Sophie, la mère de Rémi, pour essayer de comprendre…

Lukas Dhont se penche dans ce film Close sur la quête de l’identité qui se construit dans le regard des autres

Close: un titre court mais poignant, signifiant de manière antinomique à la fois proche et aussi fermé. Ce mot résonne tout au long du film où l’on suit l’amitié entre deux jeunes adolescents qui se cherchent. Ils sont en effet toujours très proches mais pourtant fermés à cause des ’qu’en-dira-t-on’ du collège. L’homosexualité n’est jamais citée, mais pourtant elle semble bien faire écho à ces deux êtres en pleine croissance. L’adolescence apparaît ici non comme une épreuve mais comme une étape à franchir.

Devant le drame qui s’ensuit, le réalisateur montre la difficulté à s’exprimer et en particulier à exprimer ce que l’on ressent pour sortir de l’enfermement «close» de la souffrance et de la culpabilité que seul le pardon peut réparer.

Lukas Dhont nous plonge dans une histoire touchante mais qui ne tombe jamais dans le pathos. Une grande pudeur qui bouleverse et surtout des images d’une force et d’une beauté saisissante, que ce soient les superbes visages de ces enfants ou le décor lumineux des champs de fleurs colorées se dégage de ce film.

Film intime,Close raconte la fracture d’une amitié adolescente fusionnelle. Léo et Rémi , amis depuis toujours, sont tous deux insouciants, créatifs et sensibles Mais un jour, il suffira d’une remarque homophobe pour faire exploser le lien intense qui unissait jusqu’à présent les deux garçons. Inquiet de la façon dont les autres peuvent envisager son amitié comme quelque chose de sexuel, Léo prend ainsi ses distances avec Rémi.Pour contredire ceux qui le raillent, il s’inscrit au hockey sur glace, sport qui passionne l’un de ses camarades populaires. Petit à petit, la proximité de son compagnon de longue date devient source d’embarras pour Léo, qui se montre distant, avant de laisser ressortir sur lui toute sa frustration dans un instant d’agressivité. Confronté à un sentiment de culpabilité et à la perte de cette amitié très forte, le garçon s’enferme progressivement sur lui-même et dans une performativité masculine à travers le sport de contact. Derrière son masque de hockey, il se protège du regard des autres mais maintient également à distance la vulnérabilité et la honte qui l’assaillent.

Comme dans Girl, son précédent film, l’issue doit être radicale, avec tout ce que cela implique de douleur et de drame.

Dans ses deux longs métrages, Lukas Dhont présente les relations sociales comme cruelles. L’entrée dans l’adolescence marque l’arrivée de la violence qui fait exploser l’enfance de Rémi et Léo. Le film aborde également le thème de la culpabilité et de la responsabilité: celle qui ronge et qui dérange. Évoquer ce sentiment de culpabilité, de responsabilité, était une volonté du réalisateur, pour montrer ses effets sur un enfant. Quitter l’enfance, c’est cela aussi, l’étape nécessaire où l’on comprend que nos actions ont des répercussions sur le monde.

Avec cette culpabilité qui ronge, vient l’idée d’une libération impossible. D’ailleurs, le film ne peut prendre fin que sur cette libération, quand enfin Léo oralise la culpabilité qui le ronge et le malaise qui s’est emparé de lui. Il s’enlève ainsi un poids, et soulage ses proches. Dans la scène de la libération, le dernier quart d’heure du film, l’émotion se libère, dans deux scènes bouleversantes où les chagrins jaillissent et finissent enfin par se rencontrer. Dans cette scène, il n’y a presque pas de mots, comme si l’essentiel était ailleurs. On voit et on sent les mots que l’autre ne dit pas, mais on ne les nomme pas. Dans le film, ce thème du non-dit est omniprésent. . Il peut enchanter et bercer, mais il peut aussi blesser, classifier, in-humaniser.

Le film est remarquable. La force émotionnelle du film n’est pas due uniquement à ses qualités d’écriture mais aussi à une mise en scène sobre et limpide.

Philippe Cabrol

https://chretiensetcultures.fr