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Va, vis et deviens

Va, vis et deviens

Exil et identité

1984. L’opération Moïse est déclenchée, à l’initiative des États-Unis et d’Israël. Des centaines de milliers d’Africains de vingt-six pays frappés par la famine sont rassemblés dans des camps au Soudan. Parmi eux, on compte des milliers de juifs éthiopiens, les Falachas, qui seront rapatriés vers Israël. Les Falachas également appelés Beta Israel (la maison d’Israël) sont des habitants de l’ Ethiopie, maintenant qualifiés en Israël  de juifs éthiopiens.(Leur origine est mal connue, leur judéité différente sur bien des points de celle des autres juifs, ils ne pratiquent pas les mêmes fêtes mais reconnaissent la fête pascale chrétienne, ne disposent pas de synagogues  En 1975, Israël reconnaît la judéité des Beta Israël au moment où ils fuient les soulèvements provoqués par le régime communiste du colonel Mengistu et se réfugient au Soudan voisin. Dirigé par le Mossad israélien avec le soutien financier des États-Unis, un pont aérien est organisé pour les rapatrier: c’est l’opération «Moïse» qui, entre novembre 1984 et janvier 1985, permet à 8000 juifs d’aller en Israël)

 C’est ce  drame qui est à l’origine du film Va, vis et deviens de Radu Mihaileanu. Ce film  suit en effet le destin d’un enfant chrétien de neuf ans confié par sa mère africaine, réfugiée au Soudan, à une femme falacha pour lui sauver la vie. En effet cette  jeune femme chrétienne  ne peut pas prétendre à être accueillie en Israël, alors elle convainc son fils de se faire passer pour un juif afin d’échapper à la famine. Le stratagème va bien fonctionner, et cet enfant quitte sa mère  avec trois  mots que cette dernière  lui a données pour seul viatique : « Va, vis et deviens » Une fois en Israël, il devient Schlomo, fils adoptif d’une famille française séfarade de Tel-Aviv. Il va y apprendre la culture occidentale, la judaïté et ses pratiques, l’amour et la conscience politique. Schlomo se socialise dans un contexte fait de racisme latent et de conflit entre Israël et la Palestine. Cependant il grandit avec la peur d’être démasqué et a une folle envie de retrouver sa mère, restée dans le camp de réfugiés.

Ce film Va, vis et deviens s’étend sur une vingtaine d’années, il est  divisé en trois grandes parties correspondant aux trois verbes du titre et aux trois âges de Schlomo  “Va” : le déracinement pour la survie, c’est le moment où la mère, chrétienne, ordonne à son fils de rejoindre les soldats de l’armée afin de le sauver de cette terrible situation et de devenir juif malgré lui. “Vis” : l’adolescence et la prise en main de sa propre destinée, c’est la période de garçon puis d’adolescent, au sein d’une famille juive et son apprentissage, c’est aussi la rencontre de l’amour et la réconciliation avec la vie. “Deviens » : l’entrée dans l’âge adulte avec la découverte de la sexualité, l’émancipation par rapport à l’autorité du père adoptif, l’achèvement de son identité lors de ses études en France et accession à la paternité. C’est l’accomplissement de son destin : devenir un homme, et réaliser cet affranchissement dont lui parlait sa mère  

Va vis et deviens pose la relation avec la mère. Le film évoque la quête de la mère. Schlomo va connaître quatre mères: la sienne, capable de dire « ce n’est pas mon fils », pour le sauver, une deuxième mère qui vient de perdre un enfant du même âge et qui retrouve une raison de vivre en recueillant Schlomo et le faisant rentrer avec elle dans l’avion de l’opération Moïse. A la mort de cette seconde mère malade, Schlomo est adopté par une famille israélienne d’origine française où une troisième mère l’ouvrira à la vie.  Et enfin, Sarah, l’amoureuse, qui en devenant mère à son tour, finit par comprendre Schlomo et le renvoie vers sa mère originelle. La figure de la mère traverse tout le film. Pensons à  cette scène à la sortie de l’école, ou le directeur demande à la mère adoptive de Schlomo de le changer d’école car les parents d’élèves n’apprécient pas qu’un noir y soit présent par crainte des maladies venues d’Afrique. Cette mère va devant l’école  crier son amour pour ce fils adopté allant jusqu’à lécher son visage. De même le moment  où cette même mère apprend à l’épouse de Schlomo que ce dernier n’est pas juif. La métaphore de la lune fait aussi penser à la figure maternelle; présente tout au long du film, cette lune visible, partout où Schlomo se trouve, lui apporte lumière et protection. A  la fin du film c’est le  cri  de la vraie mère face à ce fils qu’elle croyait à jamais perdu.

Radu Mihaileanu aborde le thème de la religion dans ce film. Il dénonce  l’ignominie des fanatiques qui ont décidé de convertir les Ethiopiens au judaïsme, il parle de la religion modérée à travers le rabbin blanc de Schlomo ainsi qu’à travers  son père spirituel. Lors de  la scène de la controverse talmudique le réalisateur montre  que la religion est dans le questionnement, dans l’interprétation : Schlomo  suit les conseils de son père spirituel qui lui transmettra les codes juifs ainsi que l’enseignement de la Torah. Scholmo  va ainsi lier ses deux identités chrétienne et juive, apportant sa réponse grâce à Saint Jean, au Talmudisme, mais surtout à son propre vécu.

Va, vis et deviens » ne se limite pas  à raconter le destin d’un jeune exilé, c’est une œuvre sur l’émigration, la solidarité internationale, le racisme, le choc des cultures, la question juive et celle de  l’identité, l’intégration sociale

Pistes pédagogiques 

1-Rechercher qui sont les Falachas ? Qu’est- ce que l’opération Moïse ? Qu’est que la controverse talmudique

2- Quels sont les personnages importants dans ce film Nommez- les. Quels changements s’opèrent en chacun des personnages ? Qui permet à Schlomo de se reconstruire. Comment, avec quelles paroles, quels actes ?

3- Schlomo va se confronter à des questions existentielles : qui suis-je ? Dieu existe-t-il ? Schlomo dira « je ne suis pas juif mais je me sens juif », paradoxe entre le lieu d’où il vient et le lieu dans lequel il s’est construit. Comment ces questions existentielles sont-elles présentées et analysées dans le film ?                                                                                            

4-Qu’est-ce qui permet à  Schlomo  de devenir homme, qu’est ce qui permet à  Schlomo  d’être lumière pour les autres?

Fiche technique

Réalisateur : Radu Mihaileanu

Interprètes : Yaël Abecassis, Roschdy Zem, Mosche Abebe, Sirak M. Sabahat, Roni Hadar

 Date de sortie : 30 mars 2005Prix : Prix du jury et le Prix du public dans la section Panorama du Festival de Berlin 2005, César du meilleur scénario original aux César 2006, Festival international du film de Copenhague 2005 : Cygne d’or du meilleur film, Festival international du film de Vancouver 2005 : Audience Award, Union de la presse cinématographique belge 2005 : Prix Humanum

https://chretiensetcultures.fr

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